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Majeurs protégés : la curatelle après avis de la Cour de cassation

Deux avis rendus par la Cour de cassation nous donnent l’occasion de préciser les contours du régime de la curatelle.

Selon le degré d’altération des facultés mentales ou corporelles du majeur, celui-ci peut être placé sous habilitation familiale, sous sauvegarde de justice, sous curatelle ou encore sous tutelle (c. civ. art. 425).

Possibilité pour un majeur en curatelle d’exercer une activité commerciale :

En l’espèce, une personne en curatelle envisageait d’exercer une activité d’apporteur d’affaires en agence immobilière sous la forme de micro-entreprise.

La micro-entreprise n’étant pas une forme juridique mais une modalité d’exploitation simplifiée d’une entreprise individuelle (bénéfice déterminé en pourcentage du chiffre d’affaire, obligations déclaratives et comptables allégées), il convenait donc de se référer, pour déterminer les conditions de la capacité, aux règles régissant l’activité envisagée.

L’activité envisagée étant de nature commerciale, il s’agissait de savoir s’il est possible pour une personne en curatelle d’exercer le commerce.

Le code de commerce comme le code civil sont muets sur la question.

Si le majeur en curatelle conserve sa capacité d’exercice pour les actes d’administration, il doit être assisté de son curateur pour les actes de dispositions ou autorisé par le juge des tutelles pour les actes plus importants (c. civ. art. 467). Ces actes, visés aux articles 505 àt 508 du code civil, ne recouvrent pas l’exercice du commerce ou d’une profession libérale.

Il en résulte qu’aucun texte n’interdit à la personne en curatelle d’exercer le commerce mais qu’elle doit, aux termes de l’article 467 du code civil, être assistée de son curateur pour les actes de disposition que requiert l’exercice de cette activité (cass. civ., 1re ch., 6 décembre 2018, n°18-70011).

Possibilité pour un majeur en curatelle, assisté de son curateur et après autorisation judiciaire, d’ouvrir un compte bancaire :

Dans l’affaire, il s’agissait de savoir si le curateur, qui assiste le majeur en curatelle pour ouvrir un autre compte bancaire que celui déjà ouvert, doit être autorisé par le juge des tutelles.

Selon l’article 427 du code civil « La personne chargée de la mesure de protection ne peut procéder ni à la modification des comptes ou livrets ouverts au nom de la personne protégée, ni à l’ouverture d’un autre compte ou livret auprès d’un établissement habilité à recevoir des fonds au public. Le juge des tutelles ou le conseil de famille s’il a été constitué peut toutefois l’y autoriser si l’intérêt de la personne protégée le commande ».

Ce texte, commun à l’ensemble des mesures de protection, s’applique notamment aux mesures de curatelle.

Par conséquent, pour la modification ou la clôture des comptes ou livrets, ainsi que pour l’ouverture d’un autre compte ou livret auprès d’un établissement habilité à recevoir des fonds du public, le majeur en curatelle, assisté de son curateur, doit être autorisé par le juge des tutelles (cass. civ. 1re ch., 6 décembre 2018, n°18-70012).

Vers une réforme de la protection juridique des majeurs ?

Le projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice modifié en nouvelle lecture par l’Assemblée nationale le 13 décembre 2018 (n°1503) prévoit d’alléger le contrôle du juge des tutelles pour certains actes de gestion.

Par ailleurs, le rapport sur l’évolution de la protection juridique des personnes (rapport Caron Déglise du 21 septembre 2018) préconise :

-la création d’une mesure judiciaire unique équivalente à la curatelle simple actuelle (régime d’assistance) pour les biens, avec possibilité de modalités renforcées pouvant aller jusqu’à la représentation sur décision spécialement motivée du juge ;

-le développement des dispositifs d’anticipation choisis par la personne elle-même, comme le mandat de protection future, qui seraient répertoriés sur un registre unique national et dématérialisé assurant la publicité de toutes les mesures de protection judiciaires et des dispositions anticipées, accessible aux juridictions, aux notaires et aux avocats.

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