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Modes amiables de résolution des litiges : une recodification et des nouveautés

Un décret du 18 juillet 2025 réécrit et regroupe en un seul titre du code de procédure civile l'ensemble des règles relatives aux modes de résolution amiable des différends, conventionnels et judiciaires. Il apporte aussi des nouveautés importantes, comme l’injonction à la conciliation et à la médiation.

Les modes amiables de résolution des litiges sont ouverts aux employeurs et aux salariés

Les dispositions du code de procédure civile relatives à la résolution amiable des différends (livre V) sont applicables aux différends qui s'élèvent à l'occasion d'un contrat de travail. Le décret 2025-660 du 18 juillet 2025 ne modifie pas ce principe général (c. trav. art. R. 1451-1 au 1.09.2025 et R. 1471-1 ; c. proc. civ. art. 1529 au 1.09.2025).

En d’autres termes, un employeur et un salarié peuvent et pourront toujours tenter de régler leur différend à l’amiable, par exemple par le biais d’une médiation conventionnelle, au lieu de saisir le conseil de prud’hommes.

Si la résolution amiable réussit, dans notre exemple la médiation conventionnelle, l’employeur et le salarié, ou l’un d’entre eux avec l’accord exprès de l’autre, peuvent faire homologuer leur accord par le juge, dont le rôle est désormais précisé (voir ci-après).

Si cette tentative de résolution amiable échoue, l’employeur ou le salarié peut saisir le juge prud’homal pour résoudre leur contentieux.

Sans nouveauté, la tentative préalable de résolution amiable ne dispense pas de saisir d’abord le bureau de conciliation et d’orientation (BCO) du conseil de prud’hommes quand celle-ci a échoué. En effet, selon la procédure habituelle devant le conseil de prud’hommes, le BCO tente de concilier les parties puis, s’il n’y parvient pas, il transmet l’affaire au bureau de jugement (c. proc. civ. art. 1529 au 1.09.2025 ; c. civ. art. 2066).

La recodification du livre V du code de procédure civile

Le décret 2025-660 du 18 juillet 2025 recodifie et regroupe en un seul livre (livre V) les dispositions du code de procédure civile relatives aux modes amiables de résolution des différends, en particulier les modes conventionnels.

Ainsi, à compter du 1er septembre 2025, il conviendra de se reporter notamment :

-pour la médiation conventionnelle, aux articles 1530, 1530-2, 1530-3, 1536 à 1537, 1541 ;

-pour la conciliation conventionnelle, aux articles 1530, 1530-1, 1530-3, 1536 à 1537, 1541 ;

-pour la procédure participative, aux articles 1538 à 1540.

À noter : les modes amiables de règlement des litiges sont dits « conventionnels » quand les parties prennent l’initiative d’y recourir. Ils sont qualifiés de « judiciaires » quand c’est le juge qui le leur impose.

Possibilité d’opter pour un règlement amiable à tout moment d’un procès

Le code de procédure civile prévoit déjà qu’il entre dans la mission du juge de concilier les parties (c. proc. civ. art. 21).

On sait aussi que, sauf exception, le juge prud’homal tente d’abord de concilier l’employeur et le salarié. C’est l’un des rôles du bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes. Si la conciliation échoue, l’affaire passe devant le bureau de jugement (c. trav. art. L. 1411-1, L. 1454-1 et L. 1454-1-1).

Le décret du 18 juillet 2025 précise que les parties à un litige au civil, comme un employeur et un salarié, peuvent à tout moment convenir de résoudre à l'amiable tout ou partie de leur litige (c. proc. civ. art. 21 et 1528-1 au 1.09.2025 ; c. trav. art. R. 1451-1 au 1.09.2025).

Ces dispositions s’appliquent à compter du 1er septembre 2025, y compris aux instances en cours.

Ainsi, l’employeur et le salarié peuvent avant un procès, pour tenter de l'éviter, mais aussi à tout moment d’un procès qui les oppose, tenter un règlement amiable de leur différend, par exemple en mettant en œuvre une médiation conventionnelle.

Le juge peut imposer de rencontrer un conciliateur ou un médiateur, sous peine d’amende

Une des nouveautés importantes du décret du 18 juillet 2025 est l’injonction de rencontrer un conciliateur ou un médiateur sous peine d'amende, sachant que les dispositions correspondantes du code de procédure civile entrent en vigueur le 1er septembre 2025 et seront applicables aux instances en cours à cette date.

Elles s’appliquent aux contentieux entre un employeur et un salarié (c. trav. art. R. 1471-1 ; c. proc. civ., Livre V ; c. proc. civ. art. 1529 au 1.09.2025).

Ainsi, le juge pourra, à tout moment de l'instance, enjoindre aux parties de rencontrer, dans un délai qu'il déterminera, un conciliateur de justice ou un médiateur qui les informera sur l'objet et le déroulement de la conciliation ou de la médiation (c. proc. civ. art. 1533 au 1.09.2025).

Et, la partie qui, sans motif légitime, ne déférera pas à cette injonction pourra être condamnée au paiement d'une amende civile d'un montant maximum de 10 000 € (c. proc. civ. art. 1533-3 au 1.09.2025).

Le juge peut refuser d’homologuer un accord illicite ou contraire à l’ordre public

Les parties qui sont parvenues à un accord réglant à l’amiable leur litige peuvent le faire homologuer par le juge. S’il s’agit d’un employeur et d’un salarié, ils demandent cette homologation au bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes (c. proc. civ. art. 1534 ; recodifié sous c. proc. civ. art. 1543 au 1.09.2025).

Cette homologation donne « force exécutoire » à leur accord (c. proc. civ. art. 1565 et 1566 ; recodifiés sous c. proc. civ. art. 1541, 1543 à 1549 au 1.09.2025). Cela signifie qu’une des parties peut en demander l’exécution forcée si l’autre ne respecte pas ses engagements.

Le décret du 18 juillet 2025 indique désormais expressément que « le juge n'homologue l'accord des parties que si son objet est licite et s'il ne contrevient pas à l'ordre public » (c. proc. civ. art. 1565 ; c. proc. civ. art. 1544, au 1.09.2025).

L’audience de règlement amiable est généralisée

Le décret du 18 juillet 2025 prévoit que « le juge saisi du litige ou chargé de l'instruction de l'affaire peut, à la demande de l'une des parties ou d'office après avoir recueilli leur avis, décider qu'elles seront convoquées à une audience de règlement amiable tenue par un juge qui ne siège pas dans la formation de jugement » (c. proc. civ. art. 1532 au 1.09.2025). Ces dispositions entrent en vigueur le 1er septembre 2025 et sont applicables aux instances en cours à cette date.

Mais attention, elles ne sont pas applicables devant le conseil de prud'hommes, pour la bonne et simple raison que c’est le principe même de la procédure prud’homale de débuter, sauf exception, par une tentative de conciliation devant le bureau de conciliation et d’orientation. Ce n’est que si la conciliation échoue que l’affaire passe devant le bureau de jugement (c. trav. art. L. 1411-1).

À noter : devant les prud’hommes, la tentative de conciliation ne pourra pas être déléguée à un conciliateur de justice (décret 2025-660 du 18 juillet 2025, art. 21 ; c. trav. art. R. 1471-1 au 1.09.2025).

La mise en état conventionnelle devient de principe et est intégrée à la procédure prud’homale

Aujourd’hui, en cas d'échec de la conciliation, le bureau de conciliation et d'orientation (BCO) du conseil de prud’hommes assure la mise en état de l'affaire avant que celle-ci ne passe en jugement devant le bureau de jugement (c. trav. art. R 1454-1).

Pour les instances introduites à compter du 1er septembre 2025, le BCO procédera à la mise en l’état seulement si les parties n’y procèdent pas par elles-mêmes (c. trav. art. R. 1454-1 au 1.09.2025 ; décret 2025-660 du 18 juillet 2025, art. 21).

La procédure prud’homale intègre ainsi une des nouveautés instaurées par le décret du 18 juillet.

Celui-ci érige en effet en principe l'instruction conventionnelle du procès civil, l'instruction judiciaire devenant l'exception (décret 2025-660 du 18 juillet 2025, art. 3 ; c. proc. civ. art. 127 au 1.09.2025).

Cela signifie que les parties à un procès sont incitées à définir elles-mêmes les modalités d’instructions de leur affaire, généralement avec l’assistance de leurs avocats (ex. : définir les points de droit auxquels elles entendent limiter le débat, fixer les modalités de communication de leurs conclusions et de leurs pièces) (c. proc. civ. art. 128 au 1.09.2025).

Le juge n’assurera la mise en l’état que si les parties ne sont pas parvenues à s’entendre sur ces points.

Les affaires ainsi instruites conventionnellement feront l'objet d'un audiencement prioritaire (c. proc. civ. art. 127 au 1.09.2025). Autrement dit, l’affaire sera plus rapidement jugée.

Décret 2025-660 du 18 juillet 2025, JO du 19