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Égalité salariale F/H
Transparence des rémunérations : les premières pistes du ministère du Travail pour transposer la directive
Le ministère du Travail a lancé, le 21 mai 2025, la concertation sur la transposition de la directive relative à la transparence des rémunérations. La refonte de l'Index égalité a été confirmée et le ministère souhaite renforcer le régime de sanctions contre les entreprises en cas de manquement au principe d'égalité des rémunérations, via la mise en place d'une pénalité financière.
Une concertation avec les partenaires sociaux et un avant-projet de loi attendu pour la rentrée de septembre
Dans le cadre de la transposition de la directive européenne relative à la transparence des rémunérations (dir. UE 2023/970 du 10 mai 2023, JOUE du 17), le ministère du Travail a souhaité engager une concertation avec les organisations syndicales et les organisations patronales, pour échanger sur les mesures législatives qu'il envisage de prendre.
À noter : cette directive du 10 mai 2023 doit être transposée en droit français d’ici le 7 juin 2026. Les entreprises se verront imposer de nouvelles obligations en matière de transparence salariale visant à garantir l’égalité de rémunération entre femmes et hommes (voir RF Social, Revue d'actualité 262, pp. 10 à 12 ; voir FH 3997, §§ 10-1 et s. ; voir aussi notre actu du 16/06/2023, « Transparence des rémunérations : les obligations vont se renforcer d'ici juin 2026 sous l'impulsion d'une directive européenne »).
Une première réunion a eu lieu le 21 mai 2025 et d’autres réunions se tiendront jusqu'à la pause estivale en juillet, avec la présentation d’un projet de texte en fin de concertation.
L’avant-projet de loi officiel sera envoyé pour avis au Conseil d’État au mois de septembre. Après sa présentation en Conseil des ministres, le projet de loi sera examiné par le Parlement, le gouvernement tablant sur une adoption avant la fin de l’année 2025. S'ensuivront le ou les projets de décret nécessaires à l’application de la loi.
D’ores et déjà, à l’occasion de la réunion du 21 mai, le ministère du Travail a présenté les premières mesures envisagées pour transposer les articles 5, 9 et 23 de la directive, qui portent sur :
-la transparence des rémunérations avant l'embauche (art. 5) ;
-l’élaboration des données relatives à l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes (F/H) sur la base de 7 indicateurs (ce qui, en France, se traduira par un « Index égalité ») (art. 9) ;
-le régime des sanctions en cas de manquement au principe d’égalité des rémunérations (art. 23).
Une refonte de l’Index égalité pour s’aligner sur les indicateurs de la directive
Un nouvel Index égalité prévu pour 2027. - Comme elle l'avait annoncé lors d'une audition devant la délégation de l'Assemblée nationale aux droits des femmes le 14 mai dernier, la ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet a confirmé la refonte de l’actuel Index de l'égalité professionnelle.
Ainsi qu’elle l’a expliqué aux partenaires sociaux, les indicateurs prévus par la directive « ne se recoupent que très partiellement » avec les indicateurs de l’Index égalité. Le ministère du Travail entend donc mettre en place un nouvel Index égalité sur la base des seuls indicateurs prévus par la directive.
Ce nouvel Index remplacera l’Index actuel dès 2027. L’année 2026 sera donc la dernière année de la déclaration de l'Index égalité aujourd'hui existant.
Pas de changement de seuil d’effectif pour le nouvel Index égalité. – Alors que la directive vise les entreprises de 100 salariés et plus, la ministre du Travail a indiqué que le seuil d’application du futur Index égalité restera fixé à 50 salariés. Il s’agit d’éviter que la transposition de la directive ne se traduise par un retour en arrière.
Ainsi, les entreprises de 50 à moins de 100 salariés, actuellement tenues de calculer et de déclarer l’Index, seront soumises aux indicateurs de la directive « selon un dispositif allégé ». La ministre précise qu'« elles ne seraient pas soumises à la nouvelle obligation d’évaluation conjointe » (voir ci-après).
Automatisation et fréquence de déclaration des indicateurs. – Pour alléger la charge administrative des entreprises, la ministre envisage « d’automatiser la déclaration des 6 premiers indicateurs via les données disponibles dans la déclaration sociale nominative » (DSN). Ces indicateurs seront à déclarer tous les ans.
À noter : ces 6 indicateurs automatisables portent sur l’écart de rémunération F/H, l’écart de rémunération F/H au niveau des composantes variables ou complémentaires, l’écart de rémunération médian F/H, l’écart de rémunération médian F/H sur toutes les composantes variables ou complémentaires, la proportion de travailleurs féminins et de travailleurs masculins bénéficiant de composantes variables ou complémentaires, la proportion de travailleurs féminins et de travailleurs masculins dans chaque quartile de rémunération.
Le 7e indicateur, c’est-à-dire l’écart de rémunération F/H par catégories de travailleurs, ventilé par salaire ou traitement ordinaire de base et par composantes variables ou complémentaires, n’étant pas automatisable, la ministre propose de moduler sa fréquence de déclaration selon la taille de l’entreprise :
-déclaration tous les trois ans pour les entreprises de 50 à moins de 250 salariés ;
-déclaration chaque année pour les entreprises de 250 salariés et plus.
Comme indiqué précédemment, pour les entreprises de 50 à moins de 100 salariés, la déclaration triennale du 7e indicateur ne déclenchera pas l’obligation d’évaluation conjointe avec les représentants du personnel en cas d’écart de rémunération d’au moins 5 %. Les entreprises devront en revanche prendre des mesures correctrices dans le cadre de la négociation périodique sur l’égalité professionnelle.
À noter : devant la délégation aux droits des femmes, la ministre avait admis que les indicateurs de la directive n’appréhendent pas celui des promotions, qui figure bien au rang de ceux de l’Index de l’égalité actuel. La concertation sera peut-être l’occasion de discussions syndicales sur ce point. Certaines organisations syndicales posent également la question de l’indicateur des augmentations de salaire après un congé de maternité, non visé par la directive.
Calendrier d’entrée en vigueur des obligations de déclarations. – Le nouvel Index sera mis en place en 2027. Les obligations de déclaration des entreprises entreront donc en vigueur en 2027 (avant juin), sur la base des données de l’année 2026 pour les 6 premiers indicateurs.
Pour le 7e indicateur, le calendrier de déclaration sera modulé selon la taille de l’entreprise :
-première déclaration en 2027 pour les entreprises d’au moins 150 salariés ;
-première déclaration en 2030 pour les entreprises de moins 150 salariés.
Index de l’égalité : fréquence des déclarations et entrée en vigueur envisagées | ||||
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≥ 50 et < 100 salariés | ≥ 100 et < 150 salariés | ≥ 150 et < 250 salariés | ≥ 250 salariés | |
6 premiers indicateurs | À partir de 2027, déclaration chaque année pour toutes les entreprises (1) | |||
7e indicateur | À partir de 2030, déclaration tous les 3 ans (2) | À partir de 2027, déclaration tous les 3 ans | À partir de 2027, déclaration chaque année | |
(1) Critères automatisables, grâce à la DSN. (2) Pour les entreprises de 50 à moins de 100 salariés, pas de déclenchement de l’évaluation conjointe (voir nos développements). |
Transparence des rémunérations avant l’embauche : informations obligatoires dans les offres d’emploi
Afin de transposer l’obligation de transparence des rémunérations avant l’embauche prévue par la directive, le ministère du Travail envisage deux mesures.
❶ Les employeurs seront tenus d’informer les candidats en publiant dans leurs offres d’emploi une fourchette de rémunération initiale et les dispositions conventionnelles applicables sur le poste concerné.
Cela se traduirait par l’interdiction pour les employeurs de publier et de diffuser des offres d’emploi ne comportant pas ces informations et la création d’une sanction administrative en cas de publication et de diffusion d’offres non conformes (cette sanction s’appliquera aux employeurs ainsi qu'aux diffuseurs).
❷ Une autre interdiction sera imposée aux employeurs, puisqu'ils n’auront plus le droit de demander au candidat sa rémunération antérieure.
Nouvelle sanction sous la forme d’une amende administrative
La directive prévoit la mise en place d’un régime de « sanctions effectives, proportionnées et dissuasives » en cas de violation des droits et obligations relatifs au principe de l’égalité des rémunérations, qui tiennent compte de « toute circonstance aggravante ou atténuante pertinente ».
En outre, la directive impose la mise en place de « sanctions spécifiques en cas de violations répétées ».
À cet effet, le ministère du Travail entend privilégier la sanction administrative. Il n’y aura pas de nouvelle sanction pénale.
Cette sanction prendra la forme d’une amende fixée en pourcentage de la masse salariale ou de façon forfaitaire en fonction du manquement.
L’amende administrative tiendra aussi compte des manquements passés et/ou répétés de l’employeur.
Concertation multilatérale sur la transposition de la directive relative à la transparence des rémunérations, 21 mai 2025