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Licenciement

L'employeur qui manifeste sans ambiguïté sa volonté de cesser la relation de travail prononce un licenciement de fait

La date de la rupture d’un contrat de travail est celle à laquelle l’employeur a irrévocablement manifesté sa volonté d’y mettre fin. Si l’employeur manifeste cette volonté avant la notification écrite du licenciement, il s’agit alors d’une rupture verbale ou de fait, qui ne peut être régularisée par la suite. C’est ce qu’illustre une affaire impliquant une chaîne de télévision bien connue.

Le communiqué d’une chaîne de télévision ne fait plus figurer une salariée dans la grille des programmes

En septembre 2015, une salariée avait été engagée par une chaîne de télévision pour assurer la présentation d’une émission.

Le 27 juin de l’année suivante, la chaîne de télévision avait publié un communiqué relatif à sa grille des programmes. Il en ressortait qu’à la rentrée de septembre 2016, la salariée ne figurait plus dans cette grille et qu’elle avait été remplacée comme présentatrice de l’émission qu’elle animait jusque-là.

Puis, le 18 juillet 2016, la salariée s’était vue notifier par écrit son licenciement pour faute grave.

La salariée a saisi les juges de diverses demandes en soutenant qu’elle avait fait l’objet d’un licenciement verbal dès le 27 juin 2016.

La rupture du contrat de travail a lieu à la date où l'employeur a manifesté sa volonté d'y mettre fin

L’employeur qui décide de licencier un salarié, après s’être entretenu avec lui, doit lui notifier sa décision par écrit à l’aide d’un courrier recommandé avec avis de réception (c. trav. art. L. 1232-6).

La rupture du contrat de travail se situe donc à la date où l'employeur a manifesté sa volonté d'y mettre fin, c'est-à-dire en principe au jour de l'envoi de la LRAR notifiant le licenciement.

Mais qu’en est-il lorsque l’employeur a manifesté de manière claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail avant la notification écrite du licenciement ?

Dans ces circonstances, la rupture n’est autre qu’une rupture verbale ou de fait qui est alors sans cause réelle et sérieuse (cass. soc. 23 octobre 2019, n° 17-28800 D). Peu importe que l’employeur ait ensuite adressé un écrit au salarié (cass. soc. 9 mars 2011, n° 09-65441 D).

C’est ce qu’illustre une nouvelle fois cette affaire.

Aux yeux des juges du fond, validés par la Cour de cassation, le licenciement de la salariée n’a pas eu lieu le 18 juillet 2016, au moment de la notification écrite de la rupture, mais le 27 juin 2016, à la date du communiqué manifestant la volonté claire et non équivoque de l’employeur de se passer des services de la salariée.

Ce licenciement n’étant autre qu’un licenciement de fait, il était donc sans cause réelle et sérieuse.

Cette affaire montre à quel point l’employeur ne doit surtout pas acter que le poste du salarié est supprimé ou sous-entendre qu’il va le remplacer avant d’avoir envoyé la lettre de licenciement. Pour éviter tout impair, il doit être très vigilant sur les communications relatives à la composition du service dans lequel se trouve le salarié.

Le préavis court à la date de la rupture du contrat de travail, même factuelle ou verbale

Lorsqu’un licenciement est notifié par écrit, la date de présentation de la lettre recommandée adressée au salarié fixe le point de départ du préavis (c. trav. art. L. 1234-3).

La Cour de cassation en déduit qu’en cas de licenciement verbal ou de fait, comme c’était le cas en l’espèce, le préavis court à compter de la manifestation de volonté de l'employeur de rompre le contrat de travail.

Ici, le préavis, qui était de 3 mois, courait donc à compter du 27 juin 2016 et avait pris fin le 27 septembre 2016. La cour d’appel ne pouvait dès lors pas se baser sur la date du 18 juillet 2016 (date à laquelle l’employeur avait ensuite notifié le licenciement par écrit) pour calculer le rappel de salaires et le montant de l’indemnité compensatrice de préavis. De même pour déterminer l’ancienneté de la salariée et, ipso facto, le montant de l’indemnité de licenciement, il fallait se placer au 27 septembre 2016.

Cass. soc. 22 mars 2023, n° 21-21104 D